Le livre Davis sur l'autisme en français / 2e partie

Nous sommes heureux de vous présenter en avant-première un extrait de la traduction française de l'ouvrage "Autism and the Seeds of Change" par Abigail Marshall et Ron Davis.

L'édition française va paraître mi-décembre 2015. Vous trouvez dans cette première partie du dernier chapitre un petit aperçu du livre et des études de cas très évocatrices venant de différents pays.

 

Bonne lecture,

 

Votre équipe Davis

Pour lire la suite : Chapitre 12 / 1e partie

Pour lire la suite : Chapitre 12 / 3e partie

Pour lire la suite : Chapitre 12 / 4e partie

Chapitre 12 / 2e partie

4. Maîtrise Guidée, Participative et Intégrée des Concepts Essentiels

Le cœur de l'Approche Davis de l'Autisme est la maîtrise guidée des concepts-clés qui fournissent les éléments manquants nécessaires au développement d’un sens précis de « soi » et d’une identité noyau naturelle. Ces concepts fournissent une compréhension à la fois du monde extérieur et du monde interne des pensées et des sensations. Le programme se termine avec un ensemble de concepts centrés sur le rôle de l’individu dans ses relations avec les autres. Chaque concept repose sur une idée simple et les concepts sont présentés séquentiellement, chacun construit sur les idées précédemment maîtrisées. Les concepts sont tirés de l’expérience plutôt que d’une théorie psychologique. Au lieu de théoriser sur quels repères du développement ordinaire devraient être reproduits pour les clients autistes, les concepts Davis ont été développés à partir de l’expérience pratique du travail avec les enfants et les adultes.

 

Avec cette démarche, le processus d’apprentissage est naturel et peut aisément suivre le rythme de l’individu, être adapté à ses besoins. L’emploi de la pâte à modeler assure la participation active de l'apprenant. Le modelage en pâte fournit aussi une méthode de description de concepts abstraits pour venir à bout des limitations dans l'aptitude au langage, et adaptée à la puissance de l’apprentissage visuel courant en autisme.[1]

L’exploration guidée et le dialogue développent et renforcent les aperçus acquis à partir du modelage en pâte, et aident l’autiste à mettre en relation les concepts et les observations des gens et des événements. L’autiste est aussi doucement guidé pour porter une plus grande attention aux autres personnes rencontrées au cours de ces explorations, utilisant l’observation à la fois comme un moyen d’illustrer et comme un moyen d’élargir les idées explorées lors du modelage en pâte.

Parce que l’ensemble des concepts et leur ordre de présentation ont été fixés, les progrès au fur et à mesure du programme peuvent facilement être constatés par la facilitante, l’autiste et les membres de sa famille. Le progrès est mesuré par la capacité de l’autiste d’identifier et d’expliquer chaque concept tour à tour, à la fois en pâte et dans le monde réel. Parce que l’on suit une succession d’étapes semblables pour la maîtrise de chaque concept, que l’on y répète l’emploi des symboles du langage de la pâte, l’autiste va vraisemblablement devenir plus à l’aise avec la démarche et travailler plus efficacement au cours du programme.

 

5. Focalisation sur la Compréhension de Soi

Ron Davis savait de sa propre enfance que son autisme équivalait à une sensation « d’être tout et rien » en même temps, et qu'il a dû d’abord franchir les étapes de l’individuation, puis du développement de l’identité avant de pouvoir fonctionner dans le monde et avoir des rapports avec les autres. Ainsi il lui paraissait évident qu’acquérir une compréhension de « soi » serait naturellement la première étape que n’importe quel autiste aurait besoin de franchir avant d’être capable de s’adapter et de fonctionner avec les autres dans le monde réel.

Ce n’est que très récemment que les chercheurs universitaires ont commencé à soupçonner l’importance de la conceptualisation de soi et du rôle que cela joue dans le processus de pensée et de comportement fonctionnel des individus autistes.[2] Les chercheurs affirment maintenant que le « soi » est « l’un des sujets les plus importants dans la recherche sur l’autisme », mais les idées tirées de la recherche n’ont pas encore été utilisées pour développer de nouvelles démarches thérapeutiques pour l’autisme.[3] La plupart des interventions thérapeutiques pour l’autisme se sont orientées plus directement sur la capacité de l’autiste d’entrer en communication avec d’autres, et reposent généralement sur l’enseignement de nouveaux comportements tels qu’encourager le contact visuel ou entraîner les capacités de conversation.

 

Le programme Davis est bâti sur l’exploration explicite des concepts en rapport avec le soi et la compréhension de soi. En plus du bénéfice potentiel que la démarche offre aux individus autistes, le programme Davis informe et influence vraisemblablement la recherche future sur le rôle que joue la connaissance de soi-même dans le développement de la compréhension sociale, ce qui est insaisissable pour les individus autistes.

 

Étude de cas : Journal d’un Programme Davis

La facilitante Davis, Karen LoGiudice, a tenu un journal de bord de la progression de son travail avec une jeune femme d’une vingtaine d’années. Amber vivait dans un centre et était inscrite à un programme de jour proposant des activités comme des projets artistiques. Lorsque Karen la rencontra la première fois, elle était très calme et répondait à la plupart des questions par un bref « oui » ou « non ». Lorsqu’elle est arrivée pour commencer le programme, les parents d’Amber étaient inquiets au sujet des problèmes de comportement qui provoquaient des difficultés au centre. Amber montrait peu d’intérêts pour les activités et les conversations des autres autour d’elle, et ses capacités de coordination physiques étaient restreintes. Ses parents l’amenaient régulièrement en voiture aux séances chez Karen et revenaient la chercher. Le programme Davis fut terminé en quinze jours, répartis en trois blocs d'une semaine, le tout étalé sur six mois. Cet étalement a donné à Karen l’opportunité d’observer les changements qui apparaissaient dans la vie d’Amber entre chaque session, alors que les graines plantées au cours de chaque semaine de programme prenaient racine et se développaient.

 

Semaine 1, octobre. Achèvement de l’individuation. Concepts du Développement de l’Identité jusqu’à « vivre » :

1° journée : Amber est extrêmement calme et peu verbale. Cependant je pense qu’elle a peut-être plus de langage qu’il ne le paraît. Amber réussit bien le relâchement et l’alignement, le réglage auditif optimal et les balles Koosh. Lorsqu’elle a écouté le ting du son de l’orientation auditive, une sensation de calme l’a envahie. Sa mère était choquée en entendant qu’elle était capable d’attraper les balles Koosh en équilibre sur un pied. Ses capacités en motricité fine sont faibles – aussi la pâte n’est-elle pas facile pour elle. La qualité de son travail de la pâte s’est un peu améliorée au cours de la journée spécialement pour les lettres. Je pense qu’elle s’ouvre à cela comme elle acquiert plus d’expérience.

 

2° journée : Amber est arrivée joyeuse. Son père a dit qu’elle était excitée par les balles Koosh et qu’il était aussi très surpris par sa capacité de les attraper. Il a dit qu’elle et sa mère avaient continué à chercher des changements sur le chemin du retour. Elle répondait bien à l’écoute du ting. Elle l’a écouté trois fois aujourd’hui (les huit minutes complètes). Amber a montré des signes d’individuation cet après-midi. Lors d’une pause, pour la première fois elle s’est adressée à moi directement avec une question sur le bruit dans son atelier de jour. Elle a dit que les autres personnes faisaient bien trop de bruit et que cela la dérangeait beaucoup. Puis elle a continué pour dire qu’une autre femme l’appelait par des noms terribles et qu’elle n’aimait pas cela. Elle a dit que ce n’était pas bien de la part de cette femme de la traiter ainsi.

 

3° journée : Amber est arrivée joyeuse. Comme nous révisions conséquence, cause et effet, avant et après, j’étais sûre qu’elle les possédait! Cela me fut encore confirmé lorsque nous avons travaillé sur le temps. Nous entreprîmes notre première « exploration à l’extérieur du bureau » à la quincaillerie et chez Dunkin Donuts. Nous mesurions avec le chronomètre toutes sortes de choses (à l’observation, à la cause, à l’effet). J’ai remarqué que le modelage devenait bien plus aisé. Amber est plus assurée en faisant ses modelages, bien qu’elle ait encore besoin d’être guidée. Sa mère a rapporté que pour la première fois depuis toujours, Amber est venue vers elle et lui a dit, « veux-tu savoir ce que nous avons travaillé aujourd’hui ? » et puis lui a décliné tous les concepts un par un. Sa maman a dit qu’elle se demandait, « Est-ce bien la même Amber que je connais depuis vingt-deux ans ? »

 

4° journée : La forme la plus simple du temps ne fut pas facile. Amber semblait vraiment fatiguée après l’avoir faite. Nous avons pris une longue pause. La séquence semblait bien se dérouler avec de nombreux exemples sur lesquels travailler. Son père était très enthousiasmé par le programme et dit qu’en revenant après le repas, il avait vu dans les yeux d’Amber une lueur qu’il n’avait jamais vue auparavant.

 

5° journée : La révision de la séquence fut impressionnante. Non seulement Amber connaissait solidement la signification, mais elle avait regardé attentivement la pâte pour montrer chaque partie du concept. C’était la première fois que je la voyais ayant de l'intention. L’ordre et le désordre passèrent bien aussi. Nous sommes allées à l’épicerie pour explorer le concept dans l’environnement et ce fut très bien. Nous avons aussi discuté de l’ordre et du désordre à propos de ses outils et de certaines situations. C'était merveilleux de l’entendre raconter comment elle pourrait les utiliser dans sa vie – « Quel serait le bon état pour toi dans -- situation ? Quels outils voudrais-tu utiliser pour cela ? Que devrais-tu faire pour faire toi-même de l’ordre ? » Elle répondait avec aisance à ces questions. Perdurer et vivre pour boucler la semaine – se passèrent bien. Sa maman était surprise et très impressionnée de nous voir jouer aux balles Koosh, de voir Amber en équilibre sur un pied, solide comme un roc, réactive lorsque les balles arrivaient sur elle.

 

 


  1. Les individus autistes semblent avoir une compétence accrue pour former, accéder et manipuler des représentations mentales visuelles (Soulières, Zeffiro, et al. 2011). Les processus visuels semblent jouer un rôle prépondérant dans le raisonnement autistique et dans la capacité à assimiler l’information (Soulières, Dawson and Samson, et al. 2009).
  2. Les premières études de recherche pour explorer la conscience de soi dans l’autisme apparaissent être un rapport publié en 1999, impliquant trois adultes avec le syndrome d’Asperger à qui l'on a demandé de noter et de décrire leurs propres pensées. (Frith and Happé 1999)
  3. (Lombardo and Baron-Cohen The role of the self in mindblindness in autism 2011) « Le rôle de soi dans la cécité mentale de l'autisme, NdT ». Voir aussi (Holbson, Explaining autism: ten reasons to focus on the developping self 2010) « Expliquer l'autisme : dix raisons de porter son attention au développement de soi, NdT »

 

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Le terme “Approche Davis® de l’Autisme®” est une marque deposée de Ronald D. Davis. L’utilisation commerciale de cette marque pour identifier des services d’éducation, d’instruction ou thérapeutiques nécessite une licence de la part du propriétaire de la marque.